Concilier agriculture, biodiversité aviaire et gestion des niveaux d’eau en marais desséché

Comment gérer les niveaux d’eau pour concilier les conduites des surfaces fourragères (prairies) et des cultures, et la biodiversité aviaire en marais desséché ?

Start date of project

01/12/2011

Localisation

Marais Poitevin

Description

Les changements de l'agriculture en Europe, incluant intensification et déprise, ont conduit à une modification importante de la biodiversité. Les populations d'oiseaux des milieux agricoles sont particulièrement impactées avec une perte globale de 48 % des effectifs en Europe depuis 30 ans et de 25% des effectifs en France depuis 20 ans. Cette érosion est principalement due à la combinaison entre pertes d’habitats et dégradation de la qualité des habitats.

Dans le cadre du projet FARMBIRD, plusieurs unités INRA (l’UMR SADAPT, le domaine expérimental de Saint-Laurent-de-la-Prée et l’UMR Economie Publique) ainsi que l’ETH Zürich (Equipe FORDEV) se sont mobilisés pour concevoir et animer une démarche de modélisation d’accompagnement portant sur la conciliation d’objectifs de production agricole et de conservation de la biodiversité à l’échelle des exploitations et des territoires agricoles dans le Marais Poitevin.

La démarche s'est déroulée en 5 phases :

  1. La mise en œuvre du projet a débuté en 2011 par une réunion entre les scientifiques INRA de l’UMR SADAPT et du domaine expérimental de Saint-Laurent-de-la-Prée afin de réaliser une cartographie des acteurs à inviter dans le cadre de cette démarche. 38 structures appartenant à différentes catégories (naturalistes, Agriculteurs, Administrations, Gestionnaires de l’eau, Développement agricole et collectivités territoriales) ont été identifié compte tenu de l’emprise géographique du Marais Poitevin à cheval sur trois départements (Vendée, Deux-Sèvres et Charente-Maritime) et deux régions (Pays de la Loire et Poitou-Charentes). Après discussion interne portant sur la pertinence de la thématique du projet FarmBird pour les organismes ciblés tout en évitant des redondances entre les différents départements potentiellement concernés, 21 personnes (18 personnes représentant chacune 1 organisme, 1 éleveur, 1 céréalier, 1 président d’une association de marais) ont finalement été identifiées pour participer aux ateliers qui ont débutés en 2012.
  2. En janvier 2012, un premier atelier d’une demi-journée a été organisé pour sensibiliser les participants à la démarche ComMod et faire émerger collectivement une question en lien avec la thématique du projet FarmBird intéressant non seulement les chercheurs mais aussi les 5 acteurs locaux présents. Lors des discussions, trois points ont particulièrement été abordés. Premièrement, les acteurs locaux ont fortement insisté pour que la question autour de la conciliation de l’agriculture et de la biodiversité portée par les chercheurs soit complétée en intégrant aussi les problèmes de gestion des niveaux d’eau. En effet, pour les participants, on ne pouvait pas parler du Marais Poitevin sans évoquer le problème de l’eau qui conditionne l’occupation du sol (prairies fauchées/pâturées vs cultures) et donc aussi la disponibilité et la qualité des habitats proposés aux oiseaux. Deuxièmement, les acteurs se sont interrogés sur la nature du territoire de marais à prendre en considération dans la modélisation puisque le Marais Poitevin est constitué de zones de marais mouillé, de marais desséché et de marais intermédiaire c'est-à-dire imparfaitement desséchés. Les acteurs locaux ont finalement optés pour centrer l’étude sur le marais desséché compte tenu de son étendu (près de 50% des surfaces de marais) et d’un plus grand nombre d’informations disponibles sur ce milieu spécifique. Par ailleurs, ils ont considéré qu’il serait plus facile de mieux prendre en considération des conflits sur les niveaux d’eau entre différents agriculteurs (éleveur vs céréalier) tout en montrant également que la préservation de la biodiversité n’est pas seulement l’apanage des éleveurs. Les céréaliers peuvent eux aussi être concernés. Troisièmement, les acteurs ont discuté du type d’outils (JdR ou SMA) qui devait être élaboré à la suite des différents ateliers. Le choix final a conduit à privilégier l’option Jeu de Rôles pour son coté très interactif permettant de faire émerger une réflexion collective en intégrant les impératifs des uns et des autres tout en laissant l’opportunité à chaque joueur de tester dans un monde virtuel – mais qui se rapproche de la réalité – des comportements ou pratiques différentes de celles adoptés dans le monde réel. A l’issu de ce premier atelier, la question retenue pour orienter l’élaboration du modèle conceptuel du futur jeu de rôles a donc été la suivante : Comment gérer les niveaux d’eau pour concilier les conduites des surfaces fourragères (prairies) et des cultures, et la biodiversité aviaire en marais desséché ?
  3. Nous avons ensuite organisé entre le 30 mars et le 6 juin 2012, 6 ateliers d’une demi-journée chacun (19 heures cumulées de discussion avec les acteurs) pour permettre à chaque participant d’expliciter ses représentations sur la question support en appliquant la méthode ARDI. Ces ateliers ont permis la co-construction d’un modèle conceptuel en identifiant les principaux acteurs, les ressources, les processus dynamiques (écologiques, économiques et sociaux) ainsi que les interactions entre acteurs et ressources participant à la gestion de l’agriculture, de la biodiversité et des niveaux au sein du marais desséché. Les éléments issus des ateliers ont servi à élaborer les bases du jeu de rôles « BotNidVeau ». Le taux de participation des acteurs locaux a été correct. 12 personnes sont venues à au moins un atelier. Un peu plus de 50% des personnes invitées ont donc réellement participé à au moins une réunion. 80% des participants sont même venus à plusieurs ateliers malgré les contraintes d’emploi du temps.
  4. L’élaboration du jeu de rôles « BotNidVeau » et son implémentation dans la plateforme Cormas a été réalisée de façon un peu sporadique entre 2014 et 2016 par ETH et l’INRA en organisant 2 ateliers d’une demi-journée avec les participants des ateliers ARDI pour discuter et valider les choix de développement. 4 crashs tests ont été organisés (1 en région avec des acteurs locaux, 2 à Paris et 1 en Suisse avec des scientifiques et des étudiants. En parallèle, nous avons cherché un partenariat local pour favoriser l’organisation de sessions de jeu et notamment l’invitation de participants agriculteurs. N’ayant pas trouvé ce commanditaire local, nous avons opté pour le recrutement d’un post-Doc via un financement du LABEX BASC et son implication locale auprès d’un petit groupe d’agriculteurs dans le cadre d’une approche anthropologique.
  5. En mars 2016, nous avons organisé une session du jeu de rôles BotNidVeau avec des éleveurs issus du groupe suivi lors de l’étude anthropologique et un naturaliste pour les faire réagir collectivement à leurs interdépendances et pour faire émerger des alternatives de gestion des cultures, des prairies et des niveaux d’eau permettant une meilleure complémentarité entre agriculture et biodiversité.

D’un point de vue appliqué, l’utilisation du jeu de rôles a permis de révéler aux agriculteurs que concurrence et complémentarité d’usages sont liés sur le territoire et qu’en se coordonnant pour allouer spatialement les différents usages, ils peuvent améliorer la conservation de la biodiversité tout en maintenant leur performance agricole. Le jeu a également permis aux agriculteurs de tester des alternatives aux MAE actuelles, en particulier des contrats agro-environnementaux comportant une dimension collective et d’en analyser les conséquences, tant environnementales (biodiversité), que productive et économiques.

Partners

Projet de recherche FARMBIRD « Coviability models of FARMing and BIRD biodiversity (2009-2012) financé par le programme SYSTERRA de l’Agence Nationale de la Recherche. Le post-doc de Pierre-Yves Hardy a été financé par le Laboratoire d’Excellence BASC (Biodiversité, Agroécosystèmes, Société, Climat)

Teams

  • Pierre-Yves Hardy, Cécile Helan, Brigitte Remy, Rodolphe Sabatier, Marion Sorrieul, Véronique Souchère, Muriel Tichit (UMR SADAPT, Thiverval-Grignon)
  • Anne Dray (ETH Zürich)
  • Maia David (UMR Economie Publique, Thiverval-Grignon)
  • Daphné Durant, Patricia Grené Eric Kerneïs (Domaine expérimental de Saint-Laurent-de-la-Prée)

Contact

Véronique Souchère